Dans un monde façonné par des princes, des démons et la magie, il existe un prince aux yeux rouges nommé Luci Star. Il est le dernier survivant de la lignée des Star, la seule famille capable de vaincre les seigneurs démons. Il y a douze ans, la Grande Guerre Sainte a ravagé le royaume de Camellia, laissant Luci orphelin et accablé par un devoir bien trop lourd pour un seul homme. Les légendes disent que ses yeux écarlates le marquent comme porteur du Pouvoir de Lumière—un don des anges et un symbole de l’éternelle attente d’héroïsme. Il est le bouclier de l’humanité, leur phare d’espoir face aux démons.
Mais Luci porte un secret, un secret qui le ferait rejeter par les gens mêmes qu’il protège : il ne veut pas combattre. Il rêve, encore aujourd’hui, d’un monde où les humains et les démons pourraient vivre côte à côte. Enfant, il s’imaginait même se lier d’amitié avec l’un d’eux, partager des rires au lieu de répandre le sang. Mais de telles pensées sont hérétiques, une trahison de tout ce que l’Église et son royaume considèrent comme sacré. Alors, Luci enfouit profondément ses espoirs, portant sa vision solitaire jusqu’aux frontières du désespoir.
Le royaume de Camellia se trouve près de la Forêt Mystique, une vaste terre de personne séparant l’humanité de l’abîme de l’Enfer. Pendant des années, Luci a gardé ses frontières, accomplissant son devoir avec une résignation silencieuse. Il s’est depuis longtemps résigné à la solitude—ses rêves de paix ne sont que des ombres qu’il ne peut se permettre de poursuivre. C’est son destin, ou du moins, il le croit : vivre et mourir seul, héros de l’humanité de nom, mais prisonnier dans l’âme.
Quand Luci atteint ses vingt ans, des rumeurs d’agitation dans les terres démoniaques traversent la frontière. Des seigneurs démons rivaux, assoiffés de pouvoir, se livrent à des guerres sanglantes qui débordent sur le territoire humain. Le chaos se propage comme un incendie, et la fragile paix à laquelle l’humanité s’était accrochée depuis des années s’effondre. La Grande Guerre Sainte recommence, et Luci—malgré sa haine de la violence—n’a pas d’autre choix que de rejoindre le combat. Mais cette guerre est différente. Ce n’est pas un simple affrontement entre humains et démons. C’est une tempête de destruction à trois côtés : démons contre démons contre humains.
Au cœur de cette tempête, le destin prend un tournant inattendu.
L’épée de Luci fendit l’air dans un éclair de lumière dorée, sa lame sifflant alors qu’elle frappait les griffes recourbées d’un démon. La créature siffla, sa peau noircie crépitant là où la lame rencontrait sa chair. Luci frappa à nouveau, cette fois sectionnant le bras du démon. Il s’effondra en hurlant, mais avant que Luci ne puisse reprendre son souffle, un autre bondit sur lui par le côté.
Il se baissa juste à temps, les griffes de la créature déchirant l’air là où, une seconde plus tôt, se trouvait son cou. Une odeur âcre de soufre emplit ses narines alors qu’il se retournait dans un mouvement fluide, sa lame décrivant un arc désespéré vers le haut. La lame perça la poitrine de la créature, et une explosion de magie lumineuse jaillit de la blessure. Le corps mort s’effondra lourdement au sol.
Autour de lui, le champ de bataille grondait—un vacarme de métal s’entrechoquant, de créatures rugissant, et de magie déchirant l’air. Son armée se trouvait quelque part dans ce chaos, luttant pour tenir la ligne. Plus tôt, il était avec eux, commandant la défense, mais l’assaut incessant des démons les avait dispersés. Maintenant, il distinguait à peine le son de leurs cornes parmi les hurlements des démons et les battements effrénés de son propre cœur.
« Tenez la ligne ! » avait-il crié avant d’être séparé, sa voix rauque d’épuisement. Mais la marée de la bataille l’avait emporté comme un morceau de bois dans une rivière déchaînée.
Il était désormais seul.
Les démons continuaient d’arriver. Peu importe combien il en abattait, d’autres s’approchaient, leurs formes grotesques se tordant et claquant dans une faim insatiable. L’épée de Luci lui semblait plus lourde à chaque coup, son souffle de plus en plus court. Bien sûr, il s’était entraîné—il n’avait pas eu le choix—mais se battre ne lui était jamais venu naturellement. La culpabilité de chaque vie qu’il prenait pesait sur lui, peu importe à quel point ses ennemis paraissaient monstrueux.
Ce ne sont que des animaux, se dit-il, répétant les mots que l’Église lui avait inculqués. Des bêtes sans esprit. Mais cela ne rendait pas le sang sur ses mains moins lourd.
Un mouvement attira son attention. Un démon plus grand bondit sur lui, son rugissement perçant déchirant l’air. La force de l’impact l’envoya rouler au sol, son épée glissant hors de sa portée. Il recula en rampant, tendant la main vers son arme, mais un autre démon en profita. Il frappa violemment son flanc. La douleur jaillit comme une flamme dans son corps, et il laissa échapper un cri étranglé, serrant la plaie alors que le sang coulait entre ses doigts.
Sa vision se brouilla. Les démons l’encerclaient désormais, leurs grognements sourds et gutturaux, leurs yeux brillants fixés sur ses moindres mouvements. Il avait perdu la trace de son armée. Il avait perdu sa force. Et maintenant, acculé au bord de la falaise, sans aucune issue, il était certain qu’il allait mourir.
C’est la fin, pensa-t-il, en pressant une main tremblante contre sa blessure, le sang formant une flaque tiède et poisseuse sous ses doigts. De son autre main, il attrapa son épée, soudainement si lourde qu’elle semblait impossible à manier. Il n’avait plus d’énergie pour canaliser sa magie lumineuse, plus de force pour frapper. Il essaya malgré tout, forçant son corps à se relever, mais ses jambes fléchirent, et il tomba à genoux.
Les démons s’approchaient, leurs grognements résonnant dans sa poitrine. Il ferma les yeux, rassemblant le peu de mana qui lui restait. S’il devait mourir, il les emporterait avec lui. Il concentra son énergie dans un dernier sort, un sort qui réduirait tout en cendres dans son rayon—lui compris.
Et puis, le ciel hurla.
L’air changea alors qu’une ombre massive descendait du ciel, ses ailes tranchant à travers la fumée. Les yeux de Luci s’ouvrirent brusquement, juste au moment où cette silhouette passait au-dessus de lui. L’instant d’après, le monde éclata en chaos. Un rugissement nouveau déchira le champ de bataille, plus fort, plus sauvage que tout ce qu’il avait jamais entendu. Un démon—non, un seigneur démon—atterrit avec une force qui fit trembler la terre, ses griffes lacérant la meute qui l’encerclait.
Luci cligna des yeux, son souffle s’arrêtant alors que la créature dévastait ses assaillants avec une précision mortelle. Un par un, ils tombèrent, leurs corps s’effondrant sous la rage du seigneur démon. Il se déplaçait comme un prédateur, ses ailes largement déployées, ses coups si rapides que Luci avait du mal à les suivre.
Luci se releva en titubant, pressant une main tremblante contre son flanc ensanglanté. Son esprit s’emballait. Pourquoi un démon m’aiderait-il ? Cela n’avait aucun sens. Et pourtant, la créature était là, dos tourné à lui, ses ailes immenses se repliant lentement alors qu’elle balayait le champ de bataille du regard.
Sa présence était écrasante, son mana irradiant en vagues si puissantes que l’air semblait vibrer autour d’eux. Les démons inférieurs s’éparpillèrent comme des animaux apeurés, laissant Luci seul face à la créature imposante.
Pendant un moment, aucun des deux ne bougea. La main de Luci se crispa sur la poignée de son épée, ses instincts lui hurlant de fuir. Mais il n’y avait nulle part où aller. Le dos de la créature restait exposé, ses ailes repliées, comme si elle ignorait Luci complètement.
Arrogant. Pensait-elle qu’il était si faible qu’il ne valait même pas la peine d’être remarqué ? Les dents serrées, Luci sentit la colère monter, mêlée à un désespoir brûlant. C’était sa seule chance. Le dos découvert de la créature était une vulnérabilité flagrante, et il ne la laisserait pas passer.
Il leva son épée, la lumière s’intensifiant le long de la lame. Chaque muscle de son corps protestait avec douleur, mais il ne pouvait pas hésiter. Dans un ultime effort, il bondit, visant le cœur du démon.
Puis, juste avant que la lame n’atteigne sa cible, quelque chose brilla dans la lumière mourante—un anneau au doigt du démon. Une chevalière dorée marquée du blason du prince, un simple objet douloureusement familière.
Luci vacilla. Son souffle se bloqua, et son attaque dévia de sa trajectoire. Alors que le démon était en train de se retourner, la lame ne fit qu’effleurer son flanc, traçant une coupure sanglante sans être fatale. Les deux adversaires se vigèrent l'un face à l'autre, yeux dans les yeux, comme si le temps pour eux s'était arrété.
Le cœur de Luci manqua un battement. Le visage qui lui faisait face n’était pas celui d’un monstre. Il était familier. Dévastateur de familiarité.
« Asher ? » Le nom glissa de ses lèvres, à peine audible. Son esprit vacilla. Cela ne pouvait pas être vrai. Cela ne devait pas être vrai.
Les souvenirs revinrent en fragments : un garçon démoniaque avec un rire éclatant comme la lumière du soleil, une promesse faite dans de la Forêt Mystique, et un lien qu’il avait cru perdu, relégué au rang d’illusions. Mais maintenant, face à lui, se tenait un fantome de son esprit devenue chair, portant l’armure de l’ennemi—un étranger arborant le visage d'un vieil ami.
Le démon tressaillit, ses yeux verts brillants se rétrécissant. Pendant un instant, quelque chose passa sur son visage—hésitation, peut-être ? De la douleur ? Cela disparut avant que Luci ne puisse le nommer, remplacé par un masque d’intensité calme. Il regardait Luci avec une intensité qui faisait mal à la poitrine du prince, comme s’il cherchait quelque chose—une réponse, un souvenir, peut-être un fragment de l’enfant qu’il avait autrefois connu.
Tous deux restèrent figés, leurs regards entrelacés—l’un empli d’incrédulité à l’idée que le démon en face de lui puisse être son ami d’enfance, l’autre rempli d'un sentiment de confusion face à la trahison silencieuse de l’humain qui avait essayé de lui transpercer le cœur.
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